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Le tour de France en BD, étape 1: la Charente

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Je devais vous pondre un petit article spécial scénaristes roublards, vantant les mérites du tirage de couverture à soi, au détriement de votre victime préférée, le dessinateur. Mais avant, un petit rappel s'impose.


On ne le redira jamais assez:

Le festival d'Angoulême est le pire endroit du monde où vendre un projet BD.


C'est même pour cette raison que j'y suis descendu la semaine dernière.

Pas spécialement par goût immodéré du défi ni par masochisme. Non, plutôt comme les enfants qui décident de mettre les doigts dans la prise malgré les mises en garde répétées de leurs parents.

Pour voir.

Pour montrer, surtout. Il faut dire que des éditeurs voulaient en voir plus sur un certain projet que je développe avec le toujours plus talentueux Tarumbana. Et que Djib et Elbe me proposaient un hébergement cinq étoiles - je ne répèterai jamais assez combien je fus ravi de mon séjour rue de Vauban. Enfin, on m'avait réservé un badge "auteur".

Refuser autant de perspectives alléchantes, c'était friser la faute déontologique. Or je me targue de faire primer la déontologie avant toute chose.

Donc, Angoulême.

Première constatation, Angoulême n'est pas une petite ville de province. Ah, je ne dis pas qu'on n'a pas vite fait le tour de la vieille ville - qui a un charme fou. Juste qu'on en a vite fait plusieurs fois le tour. De nombreuses fois. Ceci, dans un foule plus ou moins praticable, avec un sac qui pèse rapidement trois tonnes.

Car bien sûr, on a auparavant rempli sa besace de ces jolis dossiers confectionnés avec amour, après une demi-journée éreintante à courir dans tout Paris pour trouver l'imprimeur qui saura le mieux faire honneur au chef d'oeuvre que vous vous êtes mis en tête de placer aupèrs d'un éditeur majeur, contre moultes espèces sonnates et trébuchantes et une promesse de gloire éternelle signée de son sang.

Oui, les scénaristes sont souvent de doux rêveurs.

Conséquence de quoi, ils ratent souvent certaines étapes pourtant fondamentales de la réflexion la plus élémentaire.

Comme le fait que mon dossier, l'éditeur n'a aucune envie de se le trimballer dans le train - ou l'avion pour les plus VIP - en rentrant fourbu et encore à moitié ivre du festival. Même minimaliste, le moindre dossier se transforme vite en une tonne de briques, lorsque compacté en plusieurs exemplaires dans votre sac.

Deuxième constatation, ils sont légions à avoir envie de mettre les doigts dans la prise. Une chose est sûre, à Angoulême, vous allez avoir chaud, avec tous ces auteurs qui courent les mêmes stands que vous - ceux des éditeurs qui payent..euh..les plus prestigieux.

Un esprit de bonne composition en déduirait que du coup, on se sent moins seul, la fraternité entre ces membres de la grande famille de la BD jouant à plein. Bonne composition, peut-être, mais clairvoyant, laissez-moi rire.

Disons le tout net: aller démarcher à Angoulême est le meilleur moyen de se coller un grand coup d'angoisse existentialo-artistique. Un truc carabiné, au beau milieu d'une marée d'angoisses du même calibre. Celles des autres, pour le coup.

En plus, ça vous tombe dessus de préférence au moment le plus opportun. juste après vous être fait briser les genoux par un éditeur, par exemple.

Les doigts dans la prise, sans ligne de terre, vous dis-je.

Troisième constatation, la vie ne vous a rien appris, l'expérience ne vous a rien apporté: pitcher un projet en direct à un éditeur qui attend patiemment que vous vous gauffriez est toujours aussi difficile.

Evidemment qu'il ne guette pas le faux-pas à tout instant. Par contre, vous avez une imaginationdébridée, une déformation professionnelle qui peut vous jouer des tours dans ce genre de situation. Du coup, vous vous emmêlez les pinceaux, un comble pour un scénariste, et vous vous retrouvez à nouveau à jouer votre vie à chaque mot, à chaque terme employé. Vous êtes le seul à jouer, et pourtant vous êtes capable de marquer contre votre camp.

Et c'est précisément à ce moment, lorsque toutes les alarmes se déclenchent simultanément dans votre esprit, que des hectolitres de sueur viennent s'ajouter à ceux produits par la chaleur ambiante, alors que vous sentez que vous perdez pied, que vous le prenez, paradoxalement.

Votre pied, s'entend.

Peut-être l'histoire se finit-elle bien, mais pour le moment, il est un peu tôt pour le dire.
Mais il se passe des choses en coulisse, j'avoue. C'est même pour cela - par superstition, notamment - que je ne vous ne dirai pas plus.

                                             Pas pour le moment, en tout cas. Mais restez branchés, plein de news plus excitantes les unes que les autres arrivent bientôt!



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